Extraits- Les temps d'une vie - tome 5

Extrait n°1

      — Katra, reprit Poséidon fermement pour exiger le calme, tu plaides coupable et montres un réel regret pour ce qu’il s’est passé, même si tu avoues ignorer comment tu as pu en arriver à un tel acte. Puisque ton décès ne soulagera que très peu la famille de ta victime, j’ai décidé de t’infliger une punition inédite qui, à mon sens, est pire que la mort. Mon frère m’a dit qu’il existait un sort plus déplorable que celle-ci, c’est le fait d’être coincé entre deux univers, sans appartenir à aucun. Voilà quelle est ma sentence. Katra, je te condamne à un avenir sur Terre, avec les humains. Tu ne pourras plus te transformer en sirène et ton lien avec le monde sous-marin sera coupé. Tu oublieras la localisation précise de l’Atlantide afin que tu ne puisses jamais y revenir ou conduire quelqu’un ici, mais tu conserveras les souvenirs de ton passé. Demeurer avec les hommes, tout en te souvenant de nous, et en ayant conscience que jamais plus, tu ne nous reverras, telle est ta peine pour ton acte. À compter de ce jour, tu es bannie de l’Atlantide, et plus généralement de l’Olympe. Que Zeus te protège dans ta nouvelle vie !

Extrait n°2

    Intriguée, Terry releva la tête et chercha qui pouvait bien la dévisager de la sorte. C’est alors qu’elle le remarqua. 

     Un homme se tenait en retrait, près d’un arbre, et la fixait sans aucune gêne. 

     Elle s’excusa auprès des gens qui attendaient pour lui parler et marcha d’un pas vif vers l’individu, bien décidée à comprendre qui il était. Il ne vint pas dans sa direction, mais ne la quitta pas une seule seconde du regard. 

     — Bonjour, lui dit-elle en se plantant devant lui. Qui êtes-vous ? 

    Elle le dévisagea sans vergogne pour savoir si elle le connaissait, mais elle était presque certaine du contraire. Et elle était prête à parier que c’était également le cas de sa mère ! 

     L’homme semblait avoir la petite quarantaine, il était grand et devait passer des heures à la salle de sport si elle en croyait sa silhouette athlétique. Un front large, un nez fin, des joues légèrement creuses masquées sous une barbe de quelques jours, il était vraiment séduisant. 

    Il était carrément beau, se corrigea Terry en croisant les prunelles d’un bleu comme elle n’en avait jamais vu. 

   Ses cheveux poivre et sel coupés court et coiffés dans un joyeux désordre ne faisaient que renforcer ce sentiment de beauté. Qui était-il et que faisait-il aux funérailles d’une parfaite inconnue ?! 

  Car Terry en était certaine, si sa mère avait dans ses relations ce canon, elle le lui aurait déjà présenté pour tenter de caser sa fille unique ! 

Extrait n°3

   Poséidon n’en croyait pas ses oreilles ! Katra, une ancienne sirène, se serait simplement noyée dans un vulgaire lac ?! De qui se moquait-on ? Même s’il lui avait retiré ses dons lui interdisant toute transformation, elle aurait été capable de battre des records de vitesse ou d’apnée à faire pâlir d’envie les sportifs des JO ! Et elle se serait noyée ?! 

   La situation était tellement ridicule qu’il éclata de rire. Pas un son joyeux, non, un rire jaune qui n’inaugurait rien de bon pour celui qui lui cachait la vérité ! 

    — Il est inimaginable qu’elle se soit noyée, déclara-t-il enfin en fixant Terry. Katra était une nageuse hors pair, c’est impossible. 

    — C’est pourtant la conclusion du légiste qui a pratiqué l’autopsie. 

    — Eh bien, il ment ! 

   Terry eut alors un mouvement de recul instinctif en croisant le regard de cet individu bien étrange. Il avait les yeux les plus incroyables qu’elle n’avait jamais observés. Des iris d’un bleu translucide qui paraissaient habités par une volonté propre. Elle aurait pu jurer que le cercle bleu avait bougé, lui faisant penser à un océan furieux. 

Extrait n°4

Extrait n°5

    Ils restèrent un moment avec l’orque, la nourrissant plus que de raison avant de l’abandonner pour continuer la visite des bassins. Poséidon tenta de contenir autant que possible ses pouvoirs et son lien avec les animaux qui l’entourait, mais cela était compliqué. Chaque fois qu’il était en présence de l’un d’eux, il avait droit à des attentions particulières si bien que Terry le regardait d’une façon de plus en plus étrange. 

    — Qui es-tu ? lui demanda-t-elle à nouveau. 

    — Je te l’ai déjà dit, mais tu ne me crois pas. 

    — Poséidon, ouais, c’est ça. 

   Et sans qu’il comprenne, elle lui attrapa le poignet et se mit à marcher vite pour gagner l’entrée du centre dans lequel elle travaillait. Elle s’arrêta devant une immense statue représentant un vieil homme avec des cheveux longs, une barbe encore plus longue, une couronne sur la tête et un trident dans les mains. 

    — Ça, c’est Poséidon, déclara Terry en désignant la sculpture des doigts. T’es plutôt pas mal dans ton genre, je te l’accorde, mais tu n’as rien d’un dieu grec, désolée de te décevoir ! Maintenant si tu ne veux pas me révéler comment tu fais, OK, mais ne me prends pas pour une imbécile en me mentant ! 

    Poséidon demeura sans voix. Il ignorait ce qui était le pire : le fait qu’elle le traite de menteur ou bien qu’elle ne le trouve pas assez beau pour incarner une divinité ? Alors que c’est pourtant ce qu’il était ! Il allait activer le charme à pleine puissance sur cette petite effrontée et elle constaterait par elle-même ! 

Extrait n°6

    Quand Terry ouvrit les yeux, la première chose qu’elle remarqua fut le mur de verre qui se dressait face à elle et le spectacle incroyable qui se déroulait derrière. Elle quitta les bras de Poséidon, oubliant la nausée qui lui tiraillait le ventre, et se précipita devant pour s’extasier de la vue. 

    Ils étaient sous l’océan, c’était l’unique explication logique à ce qu’elle regardait. Par-delà la vitre, elle devinait les ruines d’un bâtiment. Presque totalement écroulé, celui-ci était désormais envahi de mousse et d’étoiles de mer et seuls les poissons empruntaient ce qui avait dû être une fenêtre dans un temps ancien. 

    Une tortue passa et Terry la suivit, admirant son allure paisible tandis qu’elle nageait au milieu des fleurs sous-marines. Partout où elle posait les yeux, Terry ne distinguait que des rochers couverts de plantes et de coraux qui abritaient tout un monde. 

    Des poissons aux multiples couleurs, des crabes, et divers petits animaux faisaient leur vie sans se rendre compte qu’ils étaient scrutés. Puis un banc d’hippocampes fila tranquillement et, soudain, une sirène surgit au milieu d’eux, riant aux éclats. 

   Terry eut un mouvement de recul si puissant qu’elle se serait empêtré les pieds dans le tapis si Poséidon ne l’avait pas retenue. 

     — C’était… c’était… 

     — Une sirène, oui, répondit Poséidon, amusé. 

     — Bordel de Dieu ! souffla Terry. 

Extrait n°7

Intriguée, elle chercha les curieux et finit par les deviner, cachés derrière des algues. 

   — Vous êtes démasqués, lança Poséidon. 

  Terry eut alors la surprise de voir tout un groupe de sirènes et de tritons – des sirènes mâles – s’avancer pour examiner de plus près la jeune femme. Celle-ci ne fut pas en reste, car elle sauta hors des bras du dieu pour se précipiter vers eux et les scruter à son tour. Ils étaient à hauteur identique, Terry avait même l’impression qu’elle pouvait les toucher, seul le mur de verre les séparait. 

    Des étoiles plein les yeux, elle contemplait ces êtres mythiques, les dévisageant sans scrupule, sa soif de découverte de nouveau à vif. L’une d’elles lui adressa un sourire et un signe de la main, puis fit une sorte de salto dans l’eau avant de se replacer devant la vitre. 

   — Elle te salue, lui apprit Poséidon juste derrière son dos. 

   Incapable de se retenir, Terry posa la paume sur la paroi et sentit des larmes de bonheur couler sur ses joues. Elles étaient si magnifiques ! Les femmes, comme les hommes, étaient torse nu, leurs poitrines comme atténuées et voilées d’une peau transparente, masquant l’essentiel. Puis Terry se concentra sur leurs queues. 

   Pour ça, le cinéma était assez fidèle à ce qu’elle avait sous les yeux. D’immenses écailles formaient un corps de poisson aux reflets irisés. Certaines étaient vertes, d’autres plutôt rouges ou encore bleues. 

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